Adjugé 150 000 € frais compris Mercredi 29 février, salle 10 - Drouot-Richelieu Pierre Gigoux de Grandpré (1826- ?), L’Arrivée d’une galère au pied de la mosquée Sainte-Sophie, Constantinople, 1890, huile sur toile, 90 x 150 cm. Originaire de l’île de Ré, c’est par des tableaux – paysages et marines – inspirés de l’Orient que notre artiste se fait remarquer au Salon de Paris, entre 1857 et 1865. Construite de 532 à 537 à la demande de l’empereur Justinien, la basilique Sainte-Sophie d’Istanbul (ou Sainte-Sagesse) est considérée comme la huitième merveille du monde. D’abord église chrétienne, elle devient mosquée au XVe siècle, sous l’impulsion de Mehmed II, et enfin musée, en 1934. Rares sont les peintres voyageant en Orient au XIXe siècle qui ne l’ont pas représentée dans des scènes animées de personnages et de bateaux. L’enchère de 120 000 euros portée sur cette huile sur toile de Pierre Gigoux de Grandpré donnait tardivement raison à un certain Jules Verne... N’ayant pas encore trouvé la fortune littéraire, ce dernier exerce sa plume comme critique d’art pour la Revue des Beaux-Arts à l’occasion du Salon de 1857. Il y remarque le seul tableau exposé par notre artiste, un Débarquement de colons espagnols dans le port d’Alger qui vaut à son auteur d’être qualifié de “jeune peintre d’avenir”. Considérant que “M. Gigaux (sic) dessine et que son coloris deviendra sérieux et puissant”, il conclut en affirmant qu’il “possède les vraies qualités d’un peintre, et nous pensons que l’avenir lui donnera tout à fait raison”. Si l’artiste a sans doute connu quelque succès comme en témoigne notre tableau, peint en 1890, sa carrière n’a pas fait grand bruit. Le Bénézit lui consacre une ligne sibylline : “Élève de Benassy-Desplantes. De 1857 à 1865, il exposa au Salon de Paris”. Quant à sa date de décès, elle est inconnue... La dizaine de résultats enregistrés sur Artnet permet de le suivre des rives du Bosphore jusqu’à Hanoi. L’adjudication enregistrée par notre galère – déjà reproduite dans l’encadré page 24 de la Gazette n° 8 – éclairée par un soleil couchant inspiré du Lorrain pulvérise les autres résultats du palmarès de l’artiste. En novembre dernier, pour les résultats récents, une aimable Assemblée près d’une rive en Inde (35 x 55 cm) plafonnait à 3 000 euros chez Christie’s à Paris, le sommet étant occupé depuis avril 1996 par une Felouque sur le Nil (55 x 92 cm) payée 60 500 F (11 200 euros en valeur réactualisée) chez Régis Bailleul à Bayeux. Un peintre à redécouvrir pour les amateurs de voyages aussi lointains qu’extraordinaires.